Revue nationale stratégique 2025 – sécurité économique – contrôle des investissements étrangers

Contrôle des investissements étrangers en France (IEF)
Revue nationale stratégique 2025
Revue nationale stratégique 2025

 

La sécurité économique, pilier de la Revue nationale stratégique 2025

 

Dans un monde en bouleversement, où la guerre hybride et la prédation économique deviennent des armes à part entière, la France fait évoluer ses instruments de défense. L’actualisation 2025 de la Revue nationale stratégique (RNS) marque un tournant majeur : la sécurité économique devient une fonction essentielle de souveraineté. Décryptage d’un repositionnement stratégique assumé.

Une stratégie de défense élargie aux enjeux économiques

Alors que la conflictualité s’intensifie aux frontières de l’Europe et dans les espaces hybrides, la RNS 2025 met en avant une nouvelle priorité : protéger le tissu industriel, technologique et scientifique national face aux menaces d’origine étrangère. Cette nouvelle doctrine s’appuie sur une certitude : la sécurité économique est désormais une condition de la sécurité nationale.

La défense du territoire ne se joue plus seulement sur les champs de bataille traditionnels, mais aussi dans les laboratoires, les start-ups, les chaînes logistiques ou encore les conseils d’administration. Le document propose ainsi une vision systémique, intégrant les PME, ETI, start-ups innovantes et champions industriels dans un dispositif global de protection stratégique.

Le dispositif de sécurité économique rénové : vigie de la souveraineté française

Depuis 2019, le dispositif interministériel de sécurité économique a été profondément rénové. Il repose sur une coordination étroite entre les ministères de l’Économie, des Armées, de l’Intérieur, de l’Enseignement supérieur et des Affaires étrangères. Sa mission : détecter, analyser et contrer toute menace économique pouvant affecter les intérêts vitaux de la Nation.

Ce dispositif agit en amont, dès l’apparition de signaux faibles : demandes de partenariat douteuses, tentatives d’acquisition hostiles, ou encore audits intrusifs de sociétés stratégiques. Il s’adresse en priorité aux entreprises de la base industrielle et technologique de défense (BITD), mais s’étend aussi aux secteurs sensibles civils (énergie, IA, spatial, biotechnologies…).

La loi de blocage de 1968 : un outil remis à l’honneur

Un des instruments-clés remis au cœur de la stratégie française est la loi du 26 juillet 1968, dite loi de blocage. Ce texte interdit aux entreprises françaises de transmettre certaines informations à des entités étrangères, sauf autorisation préalable de l’administration.

Face à la multiplication des audits extraterritoriaux ou à visée intrusive, notamment venus des États-Unis ou de la Chine, l’État encourage désormais les entreprises stratégiques à recourir à cette loi. PME innovantes, start-ups deeptech, ETI duales : toutes sont concernées. Il s’agit de se protéger contre des demandes de données, souvent formulées sous couvert de “compliance”, mais en réalité motivées par des intérêts de renseignement économique ou de pression réglementaire.

Investissements étrangers : la vigilance s’intensifie sur la BITD

La régulation des investissements étrangers devient un pilier complémentaire de cette politique de sécurité économique. L’accent est mis sur la vigilance renforcée vis-à-vis des prises de participation ou de contrôle dans les entreprises de la BITD. Il ne s’agit plus uniquement de stopper des opérations à risque, mais d’anticiper toute tentative d’influence ou de contournement du droit.

Les autorités françaises considèrent désormais que des situations d’actionnariat minoritaire, des alliances technologiques mal encadrées ou des projets communs asymétriques peuvent menacer la souveraineté économique de certains secteurs stratégiques. Cette approche préventive s’inscrit dans une doctrine plus large de résilience.

Start-ups, PME, ETI : le nouveau front de la sécurité économique

La stratégie nationale ne vise plus uniquement les grands groupes. Désormais, les PME et start-ups sont considérées comme des actifs de souveraineté à part entière. Beaucoup d’innovations critiques naissent dans ces structures agiles, souvent fragiles financièrement.

La RNS 2025 prévoit donc que ces entreprises bénéficient de diagnostics de sécurité économique, de conseils juridiques pour utiliser la loi de blocage, mais aussi de financements sécurisés. L’objectif est double : les protéger des prédateurs étrangers… et leur éviter d’avoir à choisir entre survie financière et souveraineté stratégique.

Une dimension cyber intégrée à la sécurité économique

À l’ère numérique, la cybersécurité est devenue un champ majeur de la sécurité économique. Les entreprises de la BITD sont désormais soumises à des clauses contractuelles de cybersécurisation, tandis que les PME et start-ups bénéficient d’accompagnements techniques.

Le vol de données stratégiques, l’intrusion dans les systèmes industriels ou la captation d’informations sur les clients sont autant de vecteurs d’affaiblissement économique. Le ministère des Armées, via la DGA, joue un rôle central pour améliorer le niveau global de maturité cyber du tissu industriel de défense.

 

L’écosystème financier mobilisé au service de la souveraineté

La sécurité économique ne s’arrête pas à la régulation : elle passe aussi par l’investissement stratégique dans les entreprises sensibles. Pour cela, plusieurs leviers sont activés :

  • Le fonds Definvest pour les technologies de défense ;
  • Le soutien de Bpifrance et de la Banque publique d’investissement aux levées de fonds souveraines ;
  • La mobilisation des acteurs financiers pour contrer les effets pervers de l’application excessive des normes ESG sur les entreprises de défense ;
  • Le plaidoyer actif au niveau européen pour ouvrir l’accès aux financements de la Banque européenne d’investissement (BEI) à ces entreprises stratégiques.

Cette politique s’inscrit dans une logique de préférence européenne assumée, visant à “concevoir européen, produire européen, acheter européen”.

Une stratégie territoriale et internationale

La sécurité économique est aussi un enjeu territorial, notamment dans les régions industrielles et les outre-mer. Les services de l’État, les préfectures et les acteurs économiques sont appelés à collaborer pour mieux cartographier les vulnérabilités locales et les renforcer face à des risques de captation, d’ingérence ou de désindustrialisation.

Sur le plan international, la France s’engage dans la défense normative contre le lawfare (instrumentalisation du droit international), dans la lutte contre les politiques coercitives et dans la promotion d’un cadre multilatéral équitable pour la compétition économique.

Une doctrine assumée de dissuasion économique

Ce que révèle en creux la Revue nationale stratégique 2025, c’est un changement profond de posture : la France ne veut plus seulement se défendre, elle veut dissuader. Dissuader les compétiteurs de venir affaiblir ses fleurons industriels. Dissuader les autorités étrangères d’imposer des audits injustifiés. Dissuader les acteurs financiers de fuir les secteurs de défense au nom d’un malentendu réglementaire.

La sécurité économique devient ainsi un instrument d’influence, de puissance et de rayonnement. Elle est érigée en fonction stratégique au même titre que la dissuasion nucléaire, l’intervention militaire ou la cyberdéfense.

De la résilience à la souveraineté

Ce que propose la RNS 2025, c’est une France pleinement réarmée — y compris sur le terrain économique. La sécurité économique n’est plus un sujet secondaire réservé aux spécialistes de l’intelligence économique : elle devient une politique publique prioritaire, une condition d’indépendance et de projection.

Alors que les lignes de front se déplacent, que les alliances se réorganisent et que les menaces mutent, protéger son économie, c’est protéger sa liberté. Et face à ceux qui instrumentalisent le droit, les normes ou les flux financiers pour affaiblir la souveraineté française, l’État affiche désormais sa détermination.

 

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Notre expertise

Relians, cabinet de conseil stratégique et institutionnel, accompagne depuis plus de 20 ans les entreprises confrontées à ces enjeux. En s’appuyant sur une lecture experte des textes, des pratiques administratives et des lignes directrices applicables, nous aidons nos clients à structurer leurs opérations en toute sécurité, dans le respect des exigences réglementaires et dans une logique de dialogue constructif avec les autorités françaises.

Relians, spécialiste du contrôle des investissements étrangers

Illustration – sécurité économique | Relians